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La généralisation du travail hybride a fait évoluer le rapport des actifs au travail, transformant par extension le rôle du bureau.D’après le Baromètre Actineo 2025, réalisé en partenariat avec l’Ifop, la principale motivation des salariés à se rendre au bureau est la volonté de collaborer efficacement avec leurs collègues, suivie du besoin de rester informés de la vie de l’entreprise. Ils attendent ainsi d’avoir des espaces variés, facilitant la concentration (accès à un bureau fermé, bulles ou boxes de confidentialité), la collaboration (salles de réunion ou petites salles de travail), mais aussi la convivialité (espace café, cuisine en libre accès).
Par ailleurs, l’essor du travail hybride a accéléré une tendance déjà bien enclenchée : l’amenuisement du rôle central que joue le travail dans nos vies. En 1990, 60 % des actifs considéraient leur travail comme une composante essentielle de leur vie, contre seulement 24 % en 2025.
Pour Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion à l’Ifop, cette tendance est en partie liée à la baisse tendancielle de la durée du travail.
« Il y a 35 ans, l'importance du travail était deux fois plus élevée que celle des loisirs. Il est probable que ce rapport s'inverse complètement dans les années à venir. »
Jérôme Fourquet
En somme, le rapport des actifs au travail s’étant transformé ces dernières années, le bureau de demain ne sera accepté par les collaborateurs que s’il est adapté à leurs nouvelles conceptions du travail. Tout projet d’aménagement doit donc tenir compte de ces mutations pour créer un environnement de travail qui réponde aux nouvelles attentes de l’ère hybride et aux besoins et usages des nouvelles générations de travailleurs.
Chaque organisation possède sa propre culture et ses usages, rendant impossible l’application d’un schéma générique. C’est pourquoi vouloir imposer un modèle standard est non seulement inefficace, mais souvent contre-productif. D’où l’importance de faire un diagnostic et de sonder toutes les parties prenantes.
Mais pour être robuste, ce diagnostic doit reposer sur l’articulation de différentes approches, quantitatives et qualitatives, pour révéler la variété des usages et éviter les angles morts. D’abord, les enquêtes et ateliers participatifs permettent de récolter les attentes déclaratives et de confronter les besoins déclarés à la pratique.
Ensuite, l’observation ethnographique offre une plongée in situ, révélant les routines informelles que les questionnaires ne captent pas.
Enfin, une phase pilote peut permettre de valider les hypothèses et ajuster la méthode avant un déploiement à grande échelle.
Comme le souligne Quentin Audrain, co-fondateur de Yemanja, une agence d’architecture spécialisée dans la conception d’espaces de travail sur-mesure, « dire qu’il n’y a qu’une seule façon de faire du flex office est une vision réductrice ». Son agence a accompagné des entreprises comme Cheerz, Cewe, Welcome To The Jungle, Swile ou Mediawan dans la création de bureaux flexibles, évolutifs et ancrés dans leur culture, en alliant stratégie d’usage, design et accompagnement au changement.
Ce n’est qu’en partant des spécificités réelles – terrain, métiers, usages – que l’on peut concevoir un environnement adapté, fédérateur et durable. Cette approche sur-mesure renforce l’adhésion, limite les résistances et aligne le projet sur les besoins profonds de l’organisation.
La clé est de distinguer les exceptions de métier des simples préférences personnelles. Un poste de travail attitré ne doit être maintenu que lorsqu’il répond à une nécessité fonctionnelle claire selon Quentin Audrain : un modélisateur 3D, par exemple, a besoin d’un poste fixe pour des raisons techniques, car cela implique un ordinateur puissant et donc une tour.
En revanche, accorder un bureau parce qu’un salarié « préfère » ne pas bouger fragilise la cohérence du dispositif. « On peut mettre en place du flex office pour une partie des collaborateurs et pas pour les autres, seulement si c’est lié au métier », précise Quentin Audrain. Cette clarté des critères dès le départ sécurise le cadre et garantit une perception équitable.
À ce titre, la méthodologie développée par Kathia Mayer-Orsini, Responsable de Projets à la Direction Générale Adjointe à l’APEC, pour repenser les centres APEC, incarne ces principes en associant exigences métiers et co-construction systématique, garantissant un déploiement à la fois rigoureux et adapté à chaque contexte local.
Depuis 2022, l’APEC déploie son programme « Centres de demain », piloté par Kathia Mayer-Orsini, pour transformer plus de 70 agences en France et dans les DROM.
Elle a imaginé une approche centrée sur des « enjeux », au-delà de la simple réduction de m² : «En tant qu’acteur emblématique du monde du travail, l’APEC a l’ambition d’être en pointe, pour offrir aux collaborateurs, et bien entendu à nos clients et à notre écosystème, de nouvelles pratiques de travail et, avec elles, toute une gamme d’usages de nos espaces.»
Sous son impulsion, chaque centre a adopté un modèle flexible et participatif pour co-produire, dans un cahier des charges standardisé en termes d’espaces, une expression de besoin reflétant parcours clients, besoins de confidentialité et usages collaboratifs. En tant que cheffe de projet et facilitatrice, Kathia Mayer-Orsini coordonne ce déploiement standardisé tout en adaptant chaque site aux spécificités de ses équipes et de son bassin d’emploi.
Pour garantir la cohérence et la reproductibilité de chaque « Centre de demain », Kathia Mayer-Orsini a mis en place une méthodologie structurée en cinq étapes :
La réussite d’un espace en flex office repose sur la capacité à offrir une palette de postures de travail qui reflète la diversité des activités et des préférences individuelles. Au-delà de la simple alternance entre bureau assis et debout, il s’agit de concevoir un continuum d’environnements où chaque collaborateur trouve la posture la plus favorable à sa tâche du moment. Cette segmentation spatiale, inspirée des principes du design ergonomique et des travaux sur la créativité collaborative, permet de passer sans rupture d’un espace de travail immersif et silencieux à une aire de collaboration informelle, favorisant le croisement d’idées.
Pour ancrer cette diversité, il est recommandé de penser l’espace en quatre grands types de zones :
Cette organisation en « îlots » multiples permet aux collaborateurs de naviguer naturellement entre différentes postures tout au long de la journée et selon leurs besoins du moment, tout en garantissant une cohérence d’ensemble et un équilibre entre travail individuel et collectif.
« La différence entre un projet de flex qui fonctionne et un qui ne fonctionne pas, c’est d’avoir le choix. Le collaborateur doit pouvoir avoir le choix entre une zone de concentration avec des écrans performants par exemple, et de l’autre côté des postes de « coworking » où il ne dispose que d’une table, d’une chaise et d’une prise. »
Quentin Audrain, co-fondateur de Yemanja

Doriane Bettinger, associée chez Parella, recommande deux principes clés aux entreprises qu’elle accompagne dans la mise en place du flex office :
Le passage au bureau partagé rend indispensable la mise à disposition d’espaces permettant de stocker ses effets personnels. Les casiers deviennent ainsi un élément clé de l’aménagement des espaces de travail dynamiques. Ils contribuent à renforcer le sentiment de sécurité, à maintenir l’ordre et à améliorer l’expérience des collaborateurs comme des visiteurs.De nombreux fabricants, comme Narbutas ou Vecos, proposent des solutions adaptées à cet usage, combinant design et praticité.
Cependant, leur implantation ne doit pas être laissée au hasard. L’aménageur Yemanja recommande de les positionner à proximité immédiate des zones de travail ou des points de passage naturels, comme les sorties. Un casier trop éloigné ou mal situé risque en effet de décourager son utilisation et de compromettre l’objectif recherché. Des casiers suffisamment grands et bien situés sont le corollaire d’une politique de « clean desk » efficace. L’enjeu est donc de les intégrer de façon fluide dans les parcours quotidiens des équipes.
👉 À lire également : 5 conseils pour installer des casiers dans des bureaux en flex office.
Pour faire du bureau un lieu de rencontres, d’échanges et d’innovation, il est essentiel de soigner les circulations et de multiplier les espaces informels et collaboratifs.
Pernod Ricard fait figure de référence en la matière : lors de la conception de son nouveau siège, The Island, l’entreprise a tout mis en œuvre pour encourager les interactions au quotidien :
👉 Pour en savoir plus : lisez notre article qui détaille comment Pernod Ricard a conçu son nouveau siège en flex office.
Au-delà de la création d’espaces informels, un réaménagement peut encourager les interactions grâce à un positionnement stratégique des ressources. Le cas de BIC est particulièrement intéressant en ce sens : lors de son aménagement en flex office, l’entreprise a décidé de regrouper toutes les salles de réunion sur un étage dédié. Pour toutes les réunions impliquant plus de quatre personnes, les collaborateurs doivent sortir de leur espace de travail pour se rendre à un autre étage, favorisant ainsi les rencontres fortuites avec des équipes qu’ils ne côtoient pas naturellement.
Le passage au flex office peut susciter des craintes quant à la perte de repères liée à la disparition du bureau attitré, où chacun pouvait personnaliser son espace avec des objets familiers. Pour y remédier, le nouvel environnement doit donc offrir de nouveaux ancrages, plus collectifs. En intégrant la culture et l’image de l’entreprise, l’aménagement et le design des bureaux jouent un rôle essentiel afin de renforcer le sentiment d’appartenance et l’engagement des collaborateurs.
Historiquement, le poste de travail personnel servait d’ancrage, mais il s’inscrivait dans un environnement souvent standardisé, fonctionnel, gris, sans expression de l’identité collective. À l’inverse, un espace conçu autour de la mission et des valeurs peut devenir un vecteur puissant de culture.
Par exemple, pour une entreprise engagée dans l’économie circulaire, on fera en sorte d’utiliser du mobilier de récup ou des matériaux upcyclés, précise Quentin Audrain.
Chez Swile, l’identité de marque a également guidé de nombreux choix architecturaux. Le siège, installé dans un bâtiment carré, aurait pu inspirer un agencement classique et rigide. Mais au contraire, les équipes ont fait le pari de la rondeur et du mouvement, en dessinant des circulations courbes, en évitant la symétrie et en intégrant des formes organiques dans les volumes comme dans le mobilier. Ce parti pris reflète une marque perçue comme vivante, fluide, dynamique. « On a travaillé les lignes et les formes pour créer quelque chose en lien avec leur culture, une ambiance vibrante, à leur image », explique Quentin Audrain. Ce type de design va au-delà de l’esthétique : il devient une traduction spatiale de l’esprit d’entreprise.
“On ne va pas transformer une culture, mais on peut la matérialiser, la rendre plus forte, plus vivante, plus concrète (…). Le bureau, c’est un lieu qui doit rappeler la mission de l’entreprise.”
Quentin Audrain
C’est également dans cette optique que BIC a conçu ses nouveaux espaces lors du déménagement de son siège à Clichy en 2022. L’entreprise a subtilement intégré des références à son identité de marque dans l’aménagement : la rondeur du BIC Boy, la silhouette du stylo iconique, ou encore des tableaux issus de sa collection d’art.
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Le bruit en open space est une problématique majeure qui affecte la concentration, la productivité et le bien-être des collaborateurs. Les niveaux sonores mesurés dans ces environnements varient généralement entre 60 et 70 décibels (dB), ce qui dépasse les recommandations de l'AFNOR, qui préconise un niveau sonore compris entre 35 et 55 dB pour les espaces de travail ouverts.
Une étude menée par l'IFOP pour l'association JNA révèle que 59 % des actifs se disent gênés par le bruit dans leur environnement de travail, entraînant une perte de productivité pour 51 % d'entre eux . De plus, une autre enquête indique que les salariés perdent en moyenne 30 minutes de travail par jour à cause du bruit, ce qui représente une perte annuelle de 4 920 € par salarié, en se basant sur un coût horaire moyen de 41 €.
Ces nuisances sonores peuvent également engendrer du stress, de la fatigue et une diminution de la satisfaction au travail, affectant ainsi la santé mentale et le bien-être général des employés. Le passage au flex office peut renforcer ces nuisances si l’aménagement des espaces n’est pas adapté. En effet, parce que les postes de travail ne sont plus attitrés, les équipes se déplacent, se recomposent, et les espaces deviennent plus ouverts. D’où l’importance de mettre en place des solutions favorisant le calme et la sérénité.
👉 Cet article est issu de notre Manuel Pratique du Flex office, qui rassemble les conseils d’experts et d’entreprises de renom qui ont réussi leur passage au flex office (BIC, Pernod Ricard, LVMH…).